Arkel - recueil " Marie "
troubler le sens du temps
de la saison
tu jouais du piano
mais je ne t'ai jamais écouté
octobre finissait
et des cris se fracassaient
sur des remparts Saint-Malo
j'entendais tes messages
mais je laissais filer le vent
je buvais le vin
que tu buvais
dans ce téléphone colère
ma poésie n'entrait plus
des baisers de station de métro
ne font pas l'amour
tu sais
je t'écris encore
mais le facteur a oublié ta rue
et le courrier file, file...
je t'aime
je te l'ai dit
avec des mots qui sont de demain
fabrication en cours
j'imprime dans la nuit
impression couleur octobre
mais j'entends un piano
c'est toi ?
" j'avais laissé mes pas
là contre tes hanches
tu voulais mon bras dessous ton bras
Paris se prenait
sous ce soleil adultère
le long des quais
où tu as retiré
une araignée de mon chapeau
tu me parlais de tes seins
de la morsure qui t'emportait
et moi pauvre homme
je n'ai pas compris
ta bouche haleine alcool
pour oublier
le baiser que tu m'as laissé
dans cette fin de promenade
qui sentait le dimanche
le lendemain,
...je t'ai téléphoné et ton répondeur m'a dit :
" Bonjour, je ne suis pas disponible pour le moment, mais tu peux me laisser un message, je te répondrai dès que je peux...je t'aime..."
je...j'ai raccroché...en ne laissant aucun message
depuis
Paris est devenu un sanctuaire
mes pas n'avancent plus
refusant les déplacements
alourdis de ton souvenir..."
nos baisers sont rouges
nos lèvres ont déteint
sur des étincelles
nos bouches ne sont plus qu'un feu
c'est con la poésie
ça rabougrit l'amour
pendant que je t'embrassais devant ce métro
je pensais aux mots que j'écrirais
pour instituer ce moment
pour que l'instant soit élevé
à son juste bonheur
c'est con la poésie
ça parle d'anges, de baisers
qui ne devraient pas s'accoupler
et mon infidèle main
qui file sur ta joue
pour connaître ton grain
ton degré de viens dans mon lit
c'est con la poésie
ça n'arrange pas les dimanches
infidèles...
je veux troubler le sens
du temps
et de la saison...
j'ai eu une rage qui se formait
du côté du cœur
j'ai allongé un vin sacripant
qui organisait mon estomac
je reculais une frontière salariale
je voulais le temps pour moi
prendre la nuit pour le jour
et tes seins pour mon réveil
et m'épuiser
dans tes intérieurs
je voulais ton corps pour moi
éliminer le diable
le passer à l'égouttoir
et sortir des chiens de mon chapeau
et sortir des chiens de mon chapeau
je vais prendre la rue
comme on prend la mer
avec une chanson Temps des Cerises
pour lever mon drapeau
regarde !
regarde le poète
dans ses habits Porca Miséria
qui gueule comme un chien
bavard de son silence
bavard !
je glisse...
sur un mot
qui refuse la torture
ta peau est plus douce
même quand tes seins sont fatigués
tourmentés par mes mains
il faut que j'apprenne...
à laisser ta peau reposer
comme un vin de garde
je suis un manœuvre
qui retire des étoffes
pour construire mes amours
je n'ai jamais regardé quand
vos yeux fuyaient
vers l'autre
vous aviez le droit d'aimer
un autre que moi
vos outrages se consumeront quand je pousserai
les obscénités des diables
à coups de verge
à coups de verge
je vais faire fuir vos liquides dans mes creux stériles
moi,
je te donnerai mes mains
pour essuyer tes larmes
quand le matin
sera sur tes seins
j'ouvre les volets mon amour
c'est le jour
c'est le jour
tu restes ?
il pleut
les fleurs sur le balcon sont trempées
ça dégouline d'un ciel gris
à te le prendre sur la gueule
couleur parisienne
sur les façades sales
ici la beauté est sur les trottoirs
quand les crachats
forment l'océan
j'ai écrit à un ami
que collé à ma fenêtre
j'étais un poisson-pilote
qui pensait à son océan
j'ai perdu ma place sur la peau d'un amour
je retourne vers mon étendue salée
il pleut
en Bretagne l'eau qui tombe
a des fées dans ses gouttes
et ne mouille que les imbéciles
je prends demain
le premier train
et mon chien mort dans ma valise
il tombe de la grêle
ça tape sur les vitres
on dirait le bruit d'un souvenir
qui tape aux carreaux
je le laisse entrer et ça me mouille les yeux
j'ai tué cette nuit
le chagrin de trop sur ma peau
j'ai remué un ventre cette nuit
mais toi tu n'étais pas là
j'ai poussé mon outrage au fond de ce ventre
j'ai pris ma place dans ce ventre inconnu
et je te déclare la guerre
en envoyant mon foutre sur son cœur
comme un chien qui marque son territoire
et je lève haut la patte
j'ai appris
mon chien m'a montré
je me suis maquillé des couleurs de bataille
et je vais te montrer de quel bois je me chauffe
je vais reprendre ton désir
à mon compte
il grêle
je referme la fenêtre
je suis mouillé comme un
océan
tu as troublé
le sens de mon temps
et des saisons...
